POKs de Sarah Honoré

Tags :
  • 2022-2023
  • temps 3
  • palo alto
  • lean
  • ecole du paradoxe
  • intervention systemique paradoxale
  • communication
Auteurs :
  • Sarah Honoré

Je vais réaliser un POK sur l'approche de Palo Alto. Le prérequis pour ce POK pour ce MON est d'être déjà familier avec le Lean.

To do list d'ici le point à mi-parcours :

To do list d'ici la fin du temps :

L'approche de Palo Alto

L'Ecole de Palo Alto est une école de pensée de l'approche systémique et des relations humaines et interactionnelles. Elle a été fondée par plusieurs chercheurs de différents horizons qui ont travaillé ensemble à Palo Alto en Californie. Les membres fondateurs de l'Ecole de Palo Alto sont :

Ces chercheurs ont beaucoup travaillé sur la théorie de la communication, la méthodologie du changement et la pratique thérapeutique en utilisant les bases de la cybernétique tel que le feed-back.

Deux des grandes théories des fondateurs de l'Ecole de Palo Alto sont la thérapie brève et l'approche systémique

La théorie de la communication et l'approche systémique développée par l'Ecole de Palo Alto

Dans la théorie de la communication développée par Palo Alto, l'essence même de la communication réside dans les processus relationnels et interactionnels On considère que tout comportement humain a une valeur communicative.

Avant de commencer, quelques définitions :

  • SYSTÉMIQUE : relatif à un système dans son ensemble (source : Le Robert)
  • SYSTÈME : Un système est un ensemble d’éléments en interaction suffisamment forte pour constituer un tout qui ne peut être décrit en considérant séparément ses éléments. Dans cette perspective, les équipes, les entreprises, les collectivités de travail sont définies comme des systèmes ouverts, c'est-à-dire en interaction avec un environnement (source : L'institut Repère)

L'analyse systémique des rapports humains consiste à étudier les actions de sujets en interaction, l'influence qu'ils ont l'un sur l'autre dans le contexte précis où ils se situent.

Grands principes

Il existe plusieurs grands principes :

Une logique de communication

Le postulat de départ de l'Ecole de Palo Alto est qu'il est impossible de ne pas communiquer, tout agissement contient de la communication. En psychologie, on considère l'ensemble "comportement - communication - relation" comme l'objet que l'on analyse et cette étude se fait sur le moment présent "ici et maintenant"

Pour l'Ecole de Palo Alto, tout message a deux sens. Le premier c'est la transmission d'une information à propos de faits, d'opinions, de sentiments ou d'expériences. Le deuxième c'est la liaison entre les interlocuteurs. Le contact entre les interlocuteurs dépend de la façon dont ils ponctuent leurs échanges, c'est ce que l'on appelle la métacommunication. Elle assure la régulation et permet de préciser le sens du message transmis. Il existe 3 types de positions d'une personne par rapport à une autre : la position inférieure, la position supérieure et la position de symétrie. L'analyse des interactions permet de prévoir les manières d'agir et d'identifier ces types de position.

La méthodologie du changement

L'Ecole de Palo Alto a développé une théorie de la communication des situations d'interaction humaine. Cette théorie sert dans leur approche du changement dans tous les domaines de la vie. Le changement est vu ici comme une modification du comportement, ce que l'on peut relier à l'apprentissage de nouveaux positionnements. Les processus d'apprentissage permettent de comprendre et d'agir dans la méthodologie du changement.

Une stratégie du changement est de changer le contexte ou de modifier la perception qu'à l'individu dessus. C'est ce que l'on nomme la technique du recadrage. Dans le contexte, on trouve l'expérience vécue, l'action et l'expression. Ces 3 éléments sont considérés comme séparés pouvant être différenciés et comparés. Par exemple, une personne en interaction avec deux autres personnes n'a une emprise que limité sur ce qui peut arriver entre eux car c'est une partie du système qu'il ne peut, de fait, contrôler entièrement.

La formule "le problème c'est la solution" est une formule célèbre de l'Ecole de Palo Alto. Cela signifie que dans certains cas le problème est le résultat d'une tentative infructueuse pour dépasser une difficulté. Le processus de changement vise à aider un individu à changer son image du monde sans s'intéresser aux raisons de cette vision de monde mais en se centrant sur ce qui doit changer et la manière de le faire.

3 principes guident la méthodologie du changement :

Sources :

L'intervention systémique paradoxale

L'intervention systémique paradoxale ou approche systémique paradoxale est une méthode d'analyse et de résolution de problèmes qui a été théorisé par le mouvement de Palo Alto.

Ses atouts sont les suivants :

On pourrait résumer cette approche à un aphorisme célèbre de Watzlawick : "Le problème c'est la solution". Cela signifie que la personne qui rencontre un problème récurrent, en réalité maintient ce problème de par la solution qu'il tente, en vain, de lui appliquer. Cette personne, dans sa façon de pensée est persuadée que sa solution est logique et nécessaire. Le paradoxe est alors de cesser d'appliquer cette tentative de solution qui paraissait évidente à l'individu mais qui ne fonctionnait pas, pour pouvoir avec une chance de résoudre le problème. Il faut réussir à éloigner la personne de sa "solution" pour ne pas entretenir le problème et retrouver sa liberté de choix.

Sources :

Lien entre Lean et approche de Palo Alto

Le Lean et l'approche de Palo Alto semblent être dans deux univers parallèles et ne jamais se croiser. Le Lean travaille sur les compétences techniques (hard skills). On intervient sur le terrain, là où les personnes travaillent et produisent de la richesse. Dans le Lean, on se base sur les faits et les chiffres, on peut appeler ça la réalité de 1er ordre. Le Lean a pour objectif de changer, apprendre, progresser. A l'opposé, le coaching selon l'approche de Palo Alto travaille sur les compétences comportementales (soft skills). L'approche de Palo Alto se focalise sur les comportements et les idées, on pourrait appeler ça la réalité de 2ème ordre. Le coaching selon Palo Alto n'a pas d'intention. A première vue, le Lean et l'approche de Palo Alto s'opposent à tous points de vue. Cependant, ils ont en commun la résolution de problèmes.

Etant donné que les 2 approches ont en commun la résolution de problèmes, nous allons tout d'abord définir un problème dans le cadre du Lean puis dans le cadre de Palo Alto. Pour le Lean, un problème est un écart entre la situation actuelle et une situation que l'on souhaite atteindre. L'un des pères fondateurs du Lean Taichii Ohno disait : "personne n'a de plus grand problème qui celui qui dit ne pas avoir de problèmes". Du point de vue de Palo Alto cette définition semble confondre problème et objectif. Pour Palo Alto, un problème est un comportement insatisfait dans une interaction qui ne reçoit pas la réponse souhaitée. On se concentre sur la vision du monde de la personne concernée et on ne cherche pas de problèmes là où il n'y en a pas.

Pour aller plus loin, nous allons regarder les différentes étapes de la résolution de problème pour les 2 cas. Le site paradoxes propose de prendre pour le Lean la méthodologie suivante :

  1. Clarifier le problème
  2. Décomposer le problème
  3. Définir la cible
  4. Analyser les causes sources
  5. Développer des contremesures
  6. Mettre en place ces contremesures
  7. Evaluer les résultats et les processus
  8. Standardiser le succès Cela correspond plus ou moins à ce que nous avons appris en cours, je suis globalement d'accord avec les différentes étapes bien que nous n'ayons pas vu une liste précise d'étapes en cours.

D'un point de vue de Palo Alto, l'étape 1. Clarifier le problème correspond au fait de poser le problème avant de poser l'objectif. De même, pour l'étape 2. Décomposer le problème, l'approche de Palo Alto voit là une exploration, on ne se précipite pas vers une solution. L'étape 3. Définir la cible ressemble à une réduction de l'objectif, à la recherche d'un objectif minimal. Sur la 4ème étape, il y a un désaccord entre les 2 approches. En effet, l'approche de Palo Alto ne croit pas à l'existence des causes sources et revendique une approche systémique (et non déterministe). Pour l'étape 5. Développer des contremesures, l'approche de Palo Alto recolle bien avec le Lean, qui considère non pas des solutions mais des contremesures, ce qui montre que le Lean est conscient que chaque action a des conséquences qui peuvent engendrer des problèmes. Concernant l'étape 6. Mettre en place des contremesures, l'approche de Palo Alto voit là quelqu'un qui fait des tentatives de solutions. Enfin la dernière étape Evaluer les résultats et les processus, cela correspond aussi à Palo Alto en voyant cela comme des recadrages pour ajuster sa vision du monde.

Maintenant que nous avons vu les points communs et les différences dans la résolution de problèmes d'après l'approche de Palo Alto et d'après le Lean. Nous allons nous intéresser à l'endroit où s'exerce ces méthodologies. Pour Palo Alto, il faut tout d'abord chercher le système pertinent pour une intervention minimaliste. Il faut avoir un regard sur les acteurs et leurs comportements. A l'inverse, le Lean cherche à optimiser les flux d'après la vision clients. L'axe privilégié est celui des processus. Il est donc possible d'oublier des parties prenantes à première vue et ne pas construire une amélioration durable. Cependant si l'on revient aux sources du Lean, la vision systémique existe bien avec le Nemawashi (= creuser une tranchée autour des racines de l'arbre, en japonais) qui consiste à rencontre de manière informelle toutes les parties prenantes pour préparer le changement.

Du point de vue de Palo Alto, le Lean est une vision du monde parmi tant d'autres. Sa force c'est qu'elle porte sa propre transformation avec le PDCA (Plan-Do-Check-Act ou roue de Deming). Le PDCA produit une transformation de la vision du monde car il va jusqu'à "penser à l'envers" en exprimant les problèmes avant d'exprimer les objectifs et en préférant échouer en respectant les processus que de réussir en sans les avoir respecté car cela permet d'apprendre quelque chose pour la suite. Il vaut mieux mettre des habits blancs pour peindre et ainsi trouver les sources de salissures plutôt que de les masquer en s'habillant en noir.

Il y a sans aucun doute des différences entre le Lean et l'approche de Palo Alto mais les deux partagent l'objectif d'augmenter le champ des possibles et de donner de la marge de manoeuvre. Le Lean le faut en se mettant au service de l'augmentation de la satisfaction des attentes des clients. Alors que l'approche de Palo Alto rend cet objectif au client pour qu'il en fasse ce qu'il veut.

En conclusion, ces 2 approches peuvent être complémentaires pour optimiser les flux et les processus tout en développent les personnes qui y travaillent. Il faut alors, travailler le plus en amont possible de la demande, regarder les interactions et les visions du monde en présence pour mieux agir sur le système.

Source : paradoxes

Exemple de mise en pratique de l'approche de Palo Alto sur la conduite du changement et résumé du livre de Dominique Bériot

Pour cette dernière partie, j'ai lu le livre Manager par l'approche systémique de Dominique Bériot (disponible au centre de documentation de l'Ecole) que j'ai trouvé très intéressant. Dans une première partie, il présente l'entreprise et ses acteurs, en expliquant le contexte, les freins au changement que l'on peut rencontrer et les changements les plus courants pratiqués en entreprise. Il présente ensuite l'approche systémique pour piloter un changement. Il appelle cette démarche CRÉER : C pour Cadrer la demande R pour Représenter l'impact des acteurs É pour Élaborer une démarche stratégique E pour Engager une dynamique de changement R pour Réguler le système Il consacre un chapitre de son livre pour chaque lettre de la démarche. Enfin dans une 3ème partie, il traite des exemples concrets de conduite du changement où il applique toute la démarche. Dans la dernière partie il se questionne sur l'avenir du management (je n'ai pas lu cette partie). Tout son développement est ponctué d'exemples qui permettent de bien comprendre les concepts expliqués.

Comme il serait trop long pour un POK de détailler chaque étape de la démarche, je vais essayer de la faire transparaitre ici à travers d'un exemple traité dans la partie 3 du livre. La situation étudiée s'intitule : le dérapage d'un projet de ligne de raffinage. Le demandeur est M.Jeanlez qui est le directeur du projet, il est le porteur de la demande et le décideur Les acteurs qui gravitent dans ce projet sont : M. Charlet (le chef de projet), l'équipe projet, la direction d'exploitation de la ligne de raffinage, le directeur de la société chargé de la construction de la ligne (M.Jobert), les entreprises sous-traitantes et le directeur de la raffinerie. On nous donne la date à laquelle le projet doit être livré et le budget. Les règles de fonctionnement du projet sont détaillées dans un manuel des procédures. S'en suit une synthèse de l'entretien avec M.Jeanlez que je ne vais pas recopier ici car elle est assez longue. Dans cet entretien, on comprend les relations entre les différents acteurs du projet, on se rend compte que M.Jeanlez n'a pas de bonnes relations avec l'ensemble des acteurs alors que M.Charlet, le chef de projet en a de très bonnes. De plus la communication entre ces deux hommes qui devraient travailler ensemble semble totalement rompue. M.Jeanlez évoque les actions qu'il a tenté pour résoudre le problème sans que cela fonctionne. Il demande à l'intervenant d'organiser une formation spécifiques pour ses collaborateurs, axée sur les problèmes de communication dans la conduite de projet. Il explique aussi les résultats qu'il attend de cette formation.

L'intervenant va alors de son coté commencer par cadrer la demande en listant :

Source : Manager par l'approche systémique, Dominique Bériot

Ensuite l'intervenant analyse la modélisation du système à considérer avec le schéma des acteurs et la nature de leur relation.(cf schéma ci-dessus) Il cherche des informations sur la stratégie à adopter. La modélisation montre ici que M.Jeanlez est complètement exclu des interactions même si il est le directeur du projet.

L'étape suivante est la réflexion stratégique. M.Jeanlez est persuadé que sa demande de formation va régler tous ses problèmes or sa solution n'est pas cohérente. Il faut donc trouver une stratégie pour contourner sa résistance. L'intervenant va ici appliquer la solution paradoxale qui consiste à aller dans son sens et à "faire plus de la même chose". Dans cette situation, le demandeur est l'obstacle au changement, on ne peut pas avancer tant qu'il résiste. L'intervenant propose à M.Jeanlez de rédiger une lettre à toutes les personnes concernées pour les inviter à un stage sur la communication lors de projets. Ils rédigent ensemble la lettre et l'envoient. L'effet anticipé par l'intervenant se produit : personne n'est volontaire pour la formation. M.Jeanlez va donc être favorable à la recherche d'une autre solution. L'intervenant peut alors se concentrer sur l'objectif n+1. Au vue des problèmes relationnels entre les différents acteurs. L'intervenant décide d'appliquer le principe stratégique "Détourner leur attention des tensions". Plutôt que de dépenser de l'énergie à résoudre des problèmes de relation, l'intervenant les fait travailler ensemble sur un nouvel objectif commun (ce qui les fera redéfinir leurs relations sans traiter explicitement des difficultés qu'ils rencontrent actuellement). L'intervenant propose alors un séminaire avec la démarche suivante :

  1. Objectif : définir les actions de progrès réciproques et leurs mises en oeuvre pour mener à bien la phase suivante du projet
  2. Les acteurs concernés : tous les acteurs du système cités au début de l'exemple
  3. Le séminaire proprement dit : il a été ouvert par le directeur qui a rappelé ses critères. Le groupe de travail s'est concentré à recueillir les attentes de chacun pour chaque étape de la phase suivante et proposer les actions à mettre en oeuvre pour répondre à ces attentes.
  4. Les résultats de la journée : un plan a été élaboré en respectant les objectifs, des actions ont été décidées avec leurs effets attendues, un responsable et un délai de réalisation.

Le résultat de l'intervention est que la suite du projet s'est bien déroulée et les contraintes ont été respectées. Des enseignements utiles ont été tirés du projet et seront utilisés dans le futur.

L'intervenant a facturé 4 jours de travail à son client, là où un consultant qui aurait fait la formation demandée par M.Jeanlez aurait facturé 9jours.

J'ai trouvé cet exemple très parlant pour comprendre comment mettre en place une approche systémique dans la conduite du changement en entreprise.

Mon avis sur l'approche de Palo Alto

J'ai trouvé ce sujet très intéressant car il nous amène à penser d'une autre manière. Le livre de Dominique Bériot est passionnant et se lit très bien (j'ai lu 180 pages en 2 jours). Je regrette de ne pas avoir découvert ce sujet plus tôt sinon j'aurais étalé son étude sur 2 POK afin de pouvoir synthétiser mes lectures et apporter plus de détails sur la conduite du changement selon Palo Alto. Je pense qu'il pourrait être intéressant d'avoir un cours sur cette approche en Do_It.